samedi 9 août 2014

Ironman Texas 2013




Ecrit le jeudi 23 mai 2013




Synopsis

Octobre 2012 : je venais alors de terminer un relai à Gérardmer avec Guillaume, (aka Sguigui sur OT) qui nous annonce qu’il partira quelques mois à Houston pour ses études… Quand on me dit « Houson » je pense tout de suite à la NASA, Apollo 13, Tom Hanks… 


Mais pas du tout à triathlon. Par pure curiosité je vais sur le site Ironman pour voir s’il y a une course dans les alentours et je tombe sur l’IM Texas qui se déroule aux Woodlands au mois de mai, à même pas 50km au nord de Houston, pile dans la période où il y sera ! Je me dis que c’est un signe, une occasion unique à ne pas rater et en moins de deux on se retrouve sur la starting list. Sandrine suit le mouvement quelques semaines plus tard. Mais tout ça reste encore bien secret…


De bien belles réjouissances au menu avec plus de 7 mois pour la prépa, que demander de plus ? Par ailleurs j’avais toujours rêvé de participer à un IM aux States, rien que pour l’ambiance spéciale bien américaine qu’on voit sur toutes les vidéos. Malheureusement le sort en a voulu autrement avec la périostite, les douleurs aux épaules et la moindre tentative d’entraînement structuré avortée avant même d’avoir commencé… Du coup, un gros passage à vide ces derniers mois, une prépa quasi inexistante en vélo et en marche (la météo n’aidant vraiment pas non plus) et une totale démotivation. Au point que j’étais partie dans l’optique de ne pas faire la course en entier, juste la partie natation pour au moins goûter un peu à l’ambiance quand même (et du coup, éviter de m’embêter à transporter mon vélo en avion, ce qui m’arrangeait bien il faut l’avouer !). En éliminant les contraintes d’entraînement du vélo et de la marche, c’est vrai que la pression est soudain retombée et j’avais tout d’un coup pas mal de temps libre pour me consacrer à autre chose, à savoir boulot, boulot et boulot : beaucoup de sollicitations ces derniers temps ! Ce qui fait que jusqu’à 2 semaines avant la course j’avais complètement occulté l’IM… c’est quand on a commencé à en discuter un peu plus sérieusement sur OT et à planifier notre voyage à Houston que j’ai réellement commencé à percuter…


Bon, d’un côté j’avais annoncé à tout le monde que je faisais une coupure en tri pendant un moment mais d’un autre côté l’envie, l’espoir et le rêve de franchir à nouveau une finish line balayaient toutes les objections plus que légitimes qui se posaient : mon sous-entraînement flagrant et mes blessures chroniques, qui tendaient légèrement vers le mieux ces derniers temps je l’avoue. Du coup, je me suis dis que j’allais quand même emmener mon vélo là-bas (et ainsi inaugurer l’ironcase de Brice !) et puis qu’ensuite je verrai bien. Le but sera de ne pas me blesser d’avantage, de faire la course comme je peux, de passer la finish line avant le cut-off de 17h, et ce sera également l’occasion de tester mon mental dans des conditions difficiles… le fameux Turtle spirit « fight finish » et voir si c’est vraiment possible de finir un IM quasi sans entraînement ! Quelques chiffres quand même pour voir l'ampleur des dégâts: voici le kilométrage fait depuis le 1er octobre 2012, c'est à dire en 7 mois et demi: natation 61 séances pour 184km (3km/séance), vélo 18 sorties pour 633km (soit environ 35km/sortie) plus 20 séances de vélo d'appart/home trainer, marche 82 séances pour 543km (soit 6.6km/séance). Aïe, aïe, aïe…


Avec Sandrine, on est arrivé à Houston une semaine avant la course, histoire de combiner vacances, tourisme et sport, et pour retrouver Guillaume qui y habite depuis près de 4 mois ! On a pu notamment profiter d’aller nager dans l’immense piscine de l’Université d’Houston, quasi totalement vide un dimanche après-midi, on avait chacun notre ligne, un luxe ! 


Sinon, au programme des premiers jours c’était : visite du Galleria Mall, petit saut à Galveston en passant par le musée de la NASA et aussi shopping dans les grands magasins Outlet. 


Quelques petites choses qui m'ont marqué: les buffets énormes au petit-déj avec notamment les gauffres à la forme du Texas, la vente de flingues et carabines juste à côté des cannes à pêche dans un magasin de sport, les fast-food à chaque coin de rue, les fameux CVS (sorte de supérette-pharmacie) ouverts 24h/24, les autouroutes avec les énormes échangeurs et les dépassements par la droite etc etc etc...

   


Jeudi 16 mai : road to The Woodlands


Le matin, on passe chez Guillaume pour le récupérer. Le 1er challenge du jour sera de faire rentrer 3 personnes, 3 vélos et 3 valises dans la Jeep ; avec un peu d’ingéniosité grandement inspirée de Tetris, tout est rapidement plié et on peut enfin prendre la route I-45 plein nord pour The Woodlands. L'excitation monte, on est chaud patate!!!

 



La circulation est bien dense mais heureusement qu’on a un GPS car avec toutes ces voies et tous ces échangeurs, on aurait probablement terminé en Louisiane ! Trois-quarts d’heure plus tard on arrive à destination pour récupérer nos dossards au check-in puis faire un petit tour des stands expo dans le village.



Mais il fait déjà tellement chaud qu’on ira assez rapidement nous poser à l’hôtel Days Inn, super bien situé à même pas 5 minutes en voiture du parc à vélo, et squatté en grande majorité par des triathlètes durant ce week-end. L’après-midi est consacré au montage des vélos et à la préparation des sacs de transition... Double-check des affaires avec Guillaume: surtout ne rien oublier ! Motivé, motivé!

   
A 17h30 on se rend au Marriott Hotel pour la pasta party : très bonne ambiance dans une énorme salle climatisée, un buffet garni à volonté, des vidéos des éditions précédentes, des athlètes interviewés etc. 


Une chanteuse a chanté l’hymne national à capella, ça faisait bien le cliché patriotique mais c'était très émouvant sur le moment tout de même. Après le repas on a eu droit au briefing, mais rien de plus par rapport aux informations du site web. Puis dodo car le lendemain soir, ça sera tendu…





Vendredi 17 mai : la pression monte


Lever tranquille avec petit-déj à l'hôtel où l'on rencontre de nombreux autres participants de toutes nationalités, qui sont déjà bien au taquet pour aller faire le swim practice à 9h... sans nous cette fois! 


On décide d’aller faire le check-in des vélos dans la matinée pour éviter la canicule mais même à 10h30 il fait déjà une chaleur monstre et le soleil tape bien fort. Retour à l’hôtel pour se reposer avant de retourner au Marriott où je devais retrouver Jeremy, un pote d’enfance qui est justement à Houston en ce moment et qui vient encourager un de ses collègues de travail ; c’était vraiment sympa de le revoir !

                                    
Ensuite, dernier repas de veille de course : des sushis dans la chambre d’hôtel avec Harry Potter qui passait à la télé (no comment). L'ambiance se fait plus calme, chacun rentre dans sa bulle. Puis coucher à 20h, mais je n’ai pas réussi à m’endormir avant 1h du matin à cause de la chaleur limite suffocante, jusqu’au moment où on a décidé de remettre la clim malgré son bruit de réacteur d’avion…





Samedi 18 mai : Houston, I have a problem !

4h30, le réveil sonne et ma première pensée c’est « p*** je suis trop crevée, j’ai vraiment pas assez dormi !!! » mais je me lève mécaniquement pour manger des toasts à la confiture (style Mc Cormick) devant l’ordi, tandis que Sandrine et Guillaume somnolent encore. 


La conversation bat son plein sur OT et facebook, les potes du salon sont au taquet pour nous suivre et j’ai la boule à l’estomac qui commence à se faire bien sentir. Je reçois aussi un sms d’encouragement de JL ; il me demande si je vais faire le vélo… je n’ai pas osé lui répondre ! Bref, ensuite 10 bonnes minutes à hésiter entre la trifonction et le singlet pendant que les deux autres sont partis prendre le ptit déj, puis le caca de la peur (n’est-ce pas Dajo) et finalement départ en voiture avec Scott un canadien du même hôtel, pour le parc à vélo le temps de regonfler les pneus et tout contrôler une dernière fois, puis de nouveau voiture jusqu’au départ de la natation. J’avais lu sur les nombreux CR de cette course que le départ se situait à près de 2km de la transition et qu’il fallait bien 20 minutes de marche pour y arriver… un stress et une fatigue inutile qu’on a pu s’épargner. 


On est tous au taquet mais avec quand même une certaine appréhension. Je perds Guillaume et Scott dans la foule et donc avec Sandrine on rejoint le bord du lac. Il est 6h40 et il fait jour maintenant, le départ des pros est dans 10 minutes mais les groupes d’âge peuvent déjà rentrer dans l’eau. Je me place vers l’avant plutôt à gauche et ensuite c’est du sur place en attendant le départ et en me prenant des coups de pieds des autres autour, beaucoup de nageurs sont accrochés à des canöes. On a encore droit à l’hymne national une dernière fois et…


Swim 2.4 miles


7h : c’est parti mon kiki ! je redoutais énormément la mass start de près de 2800 nageurs, souvent comparée à un combat de free fight, mais finalement à part les 200-300 premiers mètres où il y a eu pas mal de contact, la natation était assez comparable à celles que j’ai faites dans le passé. Bon c’est vrai que la visibilité dans l’eau était quasi nulle, on ne voyait même pas nos mains et encore moins les autres nageurs à côté. J’ai eu droit à l’habituel boulet qui n’a eu rien d’autre à faire que de me coller et  me nager dessus alors qu’il avait toute la place de libre juste à côté ! Sinon le parcours pouvait être décomposé en trois parties : une grande ligne droite d’environ 1.3km, virage à gauche puis 100m avant un nouveau virage à gauche, ligne droite de retour de 1.3km puis virage à droite pour environ 1km en entrant dans le canal. Rien de vraiment particulier pour cette natation, je redoutais surtout les douleurs à l’épaule donc j’ai vraiment nagé en souplesse au niveau des bras et ça s’est plutôt bien passé, ouf !


Par contre mon cou a pris cher avec les frottements du singlet. Ah oui, la natation était sans combi car l’eau était à plus de 24.5°C (la combi était autorisée mais avec une vague spéciale qui partait 10 minutes après, et non éligible pour la qualif) et j’ai remarqué que la respi deux temps était bien plus facile sans, et que pour une fois je n’avais pas de point à l’aine… décidément, encore des raisons de plus de ne pas aimer la combi! Sortie de l’eau en un peu moins que 1h12, mais sur le moment je n’en avais pas la moindre idée : le plus important était que je n’avais pas eu de douleurs aux épaules (un miracle) et que je sortais vraiment pas cramée.


T1 sans particularité non plus, une bénévole très sympathique m’aide avec mes affaires, je mange mon traditionnel Pitch, récupère mon vélo, perds le patch de Flector que je venais juste de me coller sur la jambe… et c’est maintenant que le plus dur commence ! 


Bike 112 miles 


A peine le temps de clipser les pédales et d’enclencher la Garmin que je remarque que mon prolongateur est de travers… et m*** je ne l’ai pas bien fixé et il commence à se détacher! Mais en y regardant de plus près je me rends compte qu’en fait c’est tout mon guidon qui est de traviole, il part sur la gauche ! WTF ?!? Je ne sais pas comment j’ai pu louper ça les jours d’avant !!! J’hésite à m’arrêter pour le remettre droit, mais la peur de perdre des minutes dont j’aurais très certainement besoin à la fin m’y fait renoncer, car oui cette fois-ci je vais devoir me battre contre les cut-off et donc chaque minute est précieuse, je ne peux pas me permettre de perdre du temps pour des choses qui ne sont pas absolument indispensables. Donc je continue, mais ça me perturbera encore un bon moment…


Théoriquement, selon les prévisions météo du jour, on était censé avoir un vent sud-sud-est de dos à l’aller puis vent de face au retour à environ 20km/h, car le parcours est en une seule grande boucle. Sur le papier également, le parcours est plat avec « seulement » 540m de dénivelé positif mais les quelques échos qu’on a eu le décrivaient plutôt comme une suite de faux-plats montants et descendants et donc pas si facile que cela, surtout entre le 40ème et le 85ème miles. Les 30 premiers km se passent plutôt bien, je tiens une bonne moyenne de 28km/h, même si je trouve que c’est quand même pas si évident que ça avec un vent censé être de dos ! Il ne fait pas encore trop chaud, je pense à boire toutes les 10 minutes comme d’habitude, et à manger une barre toutes les heures. Le but pour le vélo est de préserver au maximum ma jambe gauche pour ne pas faire flamber la périostite (qui malheureusement se ravivait à chaque sortie vélo cette année, aussi courte soit-elle) en essayant de pédaler le plus souple possible avec une cadence de minimum 90 tpm, ma cadence de confort.

                                         

 Après 1h43 de vélo Guillaume me dépasse (il était sorti peu après moi de la natation, mais avait du s’arrêter au début du vélo à cause d’une crevaison… lui qui redoutait tellement de crever !), en fait c’est juste avant le premier pointage et à ce moment-là j’imagine les réflexions des potes d’OT qui ont sûrement du remarquer ça (et j’avais bien raison hé hé). Au 40ème mile, à la fin d'une portion ombragée qui passe dans la forêt, j’aperçois Jeremy sur le bord de la route entrain de nous encourager, ça booste un max ! Mais très vite après le rendement de la route devient mauvais, le vent n’est plus vraiment de dos mais plutôt de côté, les faux-plats montants ressemblent plus à de vraies montées, il fait de plus en plus chaud et je commence à en avoir marre… Eh oui, et c’était plus que prévisible avec mon sous-entraînement : ma plus longue sortie cette année étant de 61km, honte à moi !


                          

Donc pas étonnant qu’à partir de ce moment-là ça devienne un chemin de croix. Je n’arrive plus trop à réfléchir, j’ai mal au niveau des sacro-iliaques depuis le moment où j’ai commencé à pédaler, j’ai mal aux trapèzes, je n’ai plus aucune force dans les jambes et je me fais remonter par tout le monde… oui, absolument tout le monde (j’ai dépassé seulement une personne sur tout le parcours) vu mon niveau de merde, décidément je suis vraiment une quiche en vélo. Je me fixe comme mini objectif d’aller jusqu’au ravito suivant, il y en a un tous les 10 miles, et les gens commence à s’y arrêter de plus en plus longtemps pour se reposer. Pour ma part je n’ose pas les imiter de peur de ne plus pouvoir repartir donc j’attrape des bidons d’Energy et de flotte (à 2km/h et avec la main gauche bien sûr, avec la droite ce n’était même pas la peine d’y penser) et je continue. 



Vers les miles 70 à 90 j’ai vraiment envie d’abandonner: le vent est bien fort et en pleine tronche à présent, il fait une chaleur étouffante et il n’y a quasi pas d’ombre sur le parcours, je suis complètement HS, j’ai des frissons malgré la température (ouh là, pas bon signe ça !!!) malgré une hydratation encore assez correcte à mes yeux (d’ailleurs j’ai bien pensé à Lopapy en descendant mes 8 bidons J), je frise des records de lenteurs affolants (9km/h sur du plat… si si, je le jure) et je n’arrive plus à pédaler en continu mais vu que le vent est de face et que dès que je me mets en roue libre je me retrouve quasi à l’arrêt… même ceux sur OT pensaient que j’avais abandonné tellement j’ai été lente ! Mes chevilles ont gonflé au point que la puce a commencé à me faire garrot et que j’ai du m’arrêter pour la desserrer, et j’ai eu des fourmis dans les mains à force d’être crispée sur le guidon. Je ne rêvais que d’une chose : m’arrêter dans ces superettes au bord de la route pour m’y acheter un bon red bull bien glacé mmhhh!



Des coureurs s’arrêtent même en dehors des ravitos pour se reposer mais je n’ose toujours pas les imiter, d’autant plus qu’il n’y a pas un pet d’ombre et devoir attendre la voiture balai sous la canicule, bah autant continuer à pédaler ! Donc j’ai pédalé… je pense que je n’ai jamais autant souffert à vélo, ni jamais été aussi fatiguée, tellement plus de force que je n’arrivais plus à prendre mon bidon ni à passer les vitesses avec la main gauche, ni jamais été aussi lente ; d’après mes calculs, si je voulais avoir 8h pour le marathon il fallait que je termine les derniers 50km en 2h donc du 25km/h (théoriquement faisable) mais c’était l’effondrement quand j’ai vu mon compteur bloqué à 14km/h et les minutes filer à toute vitesse. Je ne profite même plus du paysage, j'en ai rien à battre, la seule chose que je veux c'est être dans la chambre d'hôtel bien climatisée avec un coca et un red-bul! A un moment, je me file une petite frayeur en manquant de rouler sur un crotal mort (je l’aurais vu mon serpent du Texas !).

                              
Sur des tronçons interminables de lignes droites on remonte des kilomètres de voitures et camions à l'arrêt qui puent; ils doivent nous maudire car c'est bien à cause de nous que le traffic est bloqué: à chaque intersection on a eu la chance d'avoir un policier qui régulait le flux en laissant la priorité aux cyclistes, vraiment un job de ouf, chapeau et grand merci à eux! Le fait de passer enfin le 100ème mile a fait psychologiquement du bien, le revêtement de la route est devenu meilleur, le vent un peu moins de face, les paysages changent et deviennent de plus en plus urbains. Je guette le panneau des 110 miles mais en fait il n’y en a pas, finalement je vois la transition… et même Jeremy juste à l’entrée du parc ! 7h44, ce calvaire-là est enfin terminé... mais je me rends compte que je suis en retard sur mes prévisions les plus larges et j’ai vraiment peur de ne pas faire le cut-off de la course à pied, ça va vraiment être tendu du string…

                                    

T2 : un bénévole me prend le vélo, j’essaie de trottiner mais au bout de cinq pas je vois bien que c’est impossible car mes jambes sont raides comme des poteaux, donc j’enlève mes chaussures et les garde à la main tout en continuant à marcher comme je peux vers la tente. Une autre bénévole m’aide de nouveau avec les affaires : j’avais prévu de mettre des bas de contention mais je n’avais tellement plus aucune force dans les mains et les bras que je ne suis pas arrivée à les mettre, la honte ! J’ai du aussi m’y reprendre à plusieurs fois pour clipper la ceinture du porte dossard et également pour me lever de la chaise… quel tableau pitoyable ça devait faire !




Walk 26.2 miles


Il est environ 16h et il fait une chaleur terrible… j’avais à la main une bouteille d’eau qu’on m’avait donnée à T2 et que j’ai finalement gardée pour la remplir d’eau à tous les ravitos, situés tous les miles. Pareil, mon objectif était de marcher jusqu’au ravito d’après… les trois premiers miles ont été horribles : la tête qui dodelinait, je n’avais plus les pensées très nettes et j’avais fini par cacher la Garmin dans le cuissard pour ne plus regarder la vitesse qui me démoralisait de plus en plus… à ce stade-là je me suis vraiment demandé comment j’allais pouvoir tenir encore 23 miles, et surtout si j’allais réussir à finir !


Et puis là, un miracle, un déclic, ou juste simplement la bonne personne au bon moment ; je vois deux personnes qui me dépassent par la droite : un gars qui suit une fille qui marche à assez bonne allure, le gars était tout en jaune et ça m’a fait penser à un poussin qui suit sa maman. Au départ ça m’a fait marrer et puis tout d’un coup je me suis dit « il faut que je les suive ». On s’est donc retrouvé en file indienne, maman poule devant et ses deux poussins derrière, d’un point de vue extérieur ça devait être assez cocasse. La fille nous a décroché peu de temps après mais j’ai continué à suivre le poussin jaune (c’est comme ça que je l’appelais dans ma tête) pendant 2 miles jusqu’au moment où il s’est retourné (je pense qu’il a senti qu’il était suivi J) et je lui ai demandé si ça ne l’embêtait pas que je marche avec lui jusqu’à la fin, histoire de pouvoir se booster mutuellement pour maintenir l’allure et passer le cut-off, car c’était également son objectif, passer la finish line coûte que coûte. 


On a un peu discuté, il s’appelle Wesley et avait déjà fait l’IM de Floride en 2012. En fait, il avait aussi remarqué qu’on avait roulé ensemble sur la fin du vélo. C’est lui qui s’est occupé des calculs des temps de passage suivant la vitesse à laquelle on marchait, de combien de temps il nous restait pour faire tant de miles etc. Bref, cette rencontre m’a été salvatrice car à partir de ce moment-là j’ai su que je pourrais terminer la course.


On a souvent marché en silence mais tout en étant conscient de la présence de l’autre et c’était vraiment très réconfortant… ça peut paraître débile et  c’est assez difficile à expliquer mais c’est juste énorme. Et pourtant je l’avais lu dans des CR, ces compagnons d’infortune qui nous donnent des forces quand on n’en a plus et grâce à qui on arrive à dépasser ses limites… Le premier tour s’est bien terminé, Wesley a calculé qu’il nous restait 5h40 pour les deux derniers tours, largement suffisant si on continuait à tenir la cadence. Le deuxième tour s’est bien passé, le soleil commençait à se coucher et il faisait à présent plutôt agréable. Je me suis même surprise à admirer les jolies maisons du quartier résidentiel huppé des Woodlands quand on y passait, ou encore à penser à la finale de la H-Cup en me demandant qui avait gagné entre Clermont et Toulon (car Wesley, ça me faisait penser à Wesley Fofana de l’ASM… bon ok je suis grave, je sais). On prend le temps de lire les pancartes plantées tout le long du parcours; une qui m'a bien fait marrer (enfin, pas trop sur le coup) c'est "Remember that you PAID for this!!!". Même les jambes étaient en meilleur état que sur le vélo, mis à part des douleurs au niveau des plantes des pieds à cause de cloques, et aussi des frottements du cuissard. A partir du semi-marathon on a commencé à baisser en cadence, Wesley me disait de partir devant mais je ne voulais pas le lâcher ! Pas grave, de toute façon je m’en balançais du temps, je voulais juste qu’on termine les deux. On profite de l'ambiance moins bondée, les spectateurs sont encore en nombre à nous encourager avec des "Great, you look awesome!" même si on lookait pas awesome du tout je pense! Il y avait même des gars torse-poil qui dansaient quand on passait à leur niveau, la sono à fond, je me rappelle avoir même fredonné sur du Black Eyed Peas.


Au début du 3ème tour j’ai commencé à ressentir une tension dans le mollet, dans l’insertion sur le tendon d’Achille et dans l’arrière cheville droite, une douleur (trop) bien connue qui m’a fait flipper à mort… mais j’arrivais toujours à marcher sans qu’elle s’empire, elle était juste présente donc j’ai continué. Et surtout je ne pouvais pas abandonner maintenant si près de la fin, alors que le plus dur était fait ! On nous a donné des glow sticks pour nous éclairer dans le noir, super, je rêvais aussi d’en avoir J hé hé. J’ai vraiment bien aimé ce dernier tour car il faisait noir à présent, il ne restait plus beaucoup de monde sur le parcours, et on savait qu’on était tous au même point et qu’on allait le faire ce p*** de cut-off !!! A deux miles de la fin Wesley s’est arrêté une puis deux fois pour faire des étirements à cause de crampes. Il m’a dit de continuer et maintenant qu’on était si proche de la fin je l’ai laissé, non sans le remercier assez pour son aide, il a été mon poussin-jaune-ange-gardien. 


A moins d’un mile de l’arrivée, dans une sorte de tunnel à deux voies, je regarde les gens qui arrivent d’en face (qui sont donc environ 5-10min devant) et tout d’un coup je croise le regard de… Guillaume ! Sur le moment on était juste hyper surpris tous les deux, moi car je pensais qu’il était loin devant et qu’il avait du finir depuis longtemps, lui parce qu’on lui a dit que j’avais abandonné après le vélo ! Du coup on avait l’air un peu con genre « hein ? mais euh tu fous quoi là ?!? ». Puis on a continué chacun dans notre sens. Quelques minutes plus tard en repassant dans le tunnel je le vois qui m’attend ! Trop sympa, on va franchir la finish line ensemble, c’est cool et ça va bien faire marrer le salon.


Donc on savoure les derniers hectomètres qui nous mènent vers l’arrivée… la sono se fait de plus en plus forte, la foule est amassée le long des barrières, l’ambiance est juste incroyable, on prend le temps de remercier toutes ces personnes qui ne nous connaissent pas mais qui nous encouragent à fond, j’ai adoré. Puis enfin on voit l’arche, les cents derniers mètres sont en montée (vicieux !), Guillaume commence à courir comme s’il voulait faire un sprint avec Hussein Bolt mais je le calme direct, non mais ho ! Plus que quelques mètres et finalement on entend le tant convoité : YOU’RE AN IRONMAN !!!!!!!


Le chrono est anecdotique, 16h36 soit presque 4h de plus que mon meilleur temps, mais ce n’était pas du tout la même chose… Je l’ai fait, j’ai passé le cut-off pile comme je l’avais imaginé: en roulant en souplesse (enfin presque) et en marchant sur le marathon. Le motto du jour c’était patience et persévérance. J’ai tellement galéré ces deux dernières années, subi tellement de frustrations et de démotivation (certains en ont été témoins, vous pouvez donc comprendre à quel point j’étais tombée bas), j’en ai tellement chié sur cette course autant physiquement que mentalement (enfin, je dirais que j’en ai vraiment plus que chié en vélo, car la natation ça allait, et le marathon j’ai adoré et je me sentais vraiment bien excepté les 3 premiers miles) que cet ironman, ben c’est ma plus belle victoire, celle dont je suis la plus contente (et pourtant, y’a vraiment pas de quoi en être fier). Il a été le pire et le plus terrible en terme de difficulté, mais le meilleur en terme de souvenir, et de l’avoir fini main dans la main avec un pote, c’est encore meilleur… all in Turtle spirit « fight finish ».


Bravo à Guillaume pour son baptême de l’IM… anything’s possible! Ce n’est que partie remise pour Sandrine qui a été terrassée par la chaleur en vélo, et qui n’a malheureusement pas pu terminer la course… comme beaucoup d’autres coureurs d’après les statistiques. Merci à Jeremy d’être venu et pour tes encouragements au mile 40 et à T2 ! Merci à tous les potes du Salon : Brice, JL, millke, Auré, Tripatouille, Kurios, L’Dingo, Section67, Phiphitri et tous ceux que j’ai oublié, pour la couverture en live de notre course, c’est juste énorme et vraiment trop drôle à lire après coup! Merci également à Bettyboop, Lopapy et Irontri sur facebook pour les encouragements, les conseils et le soutien! Merci à Philippe et Dajo qui continuent à supporter mes cacas nerveux sur le blog ! Merci à la team Pollito, Laure et Fenouille de pirate ! ça y est, j’ai enfin gagné mon tiiiii-shiiiirrrrttt !!! Tak tak, ouaich couz’


« Chaque jour, je survis… pendant un ironman je revis »
merci Turtle pour cette phrase qui, aujourd’hui, a pris tout son sens !




 
 



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